Que diriez-vous si on vous limitait à ne pas courir plus de 800 mètres? Connaissant vos propres capacités et vos propres objectifs, comment réagiriez-vous si on vous disait que vous êtes trop faible pour courir moins d’un kilomètre? À une époque pas si lointaine, c’est à cette école de pensée que se heurtaient les femmes lorsqu’elles souhaitaient pratiquer la course à pied. Les pseudo-chercheurs n’avaient guère une bonne estime envers la condition physique de la gent féminine. Trop faibles, pas assez d’endurance et même possibilité de perdre son utérus et risque d’infertilité, bref un portait peu gratifiant. Pour démocratiser le sport et mettre fin à ses croyances bidons, il a fallu de l’audace, du courage, mais aussi un scandale.
L’épisode #1 de la révolution marathonienne fût marqué par Roberta Gibb qui s’était cachée dans les buissons pour tenter de rejoindre la course au Marathon de Boston. Sa participation n’étant pas tolérée, elle fût expulsée. Une méthode un tant soit peu anarchique, qui a semé un germe de rébellion dans le milieu. Un pas de plus vers l’évolution des droits des femmes.
Il faut attendre un an plus tard à la même épreuve, soit le 19 avril 1967, pour que l’évolution se poursuive et que Katherine Switzer marque l’histoire. Si la scène s’était produite en 2017, Switzer aurait arboré un chandail #jesuismarathonienne pour faire de pair avec son filtre de profil Facebook et créer un mouvement, mais dans l’humeur du moment, elle a plutôt opté pour la discrétion: jogging et capuche grise. À ce moment, elle ne se sentait pas plus activiste qu’une autre. Dans la mêlée de la ligne de départ, on ne la distingue pas de la masse, elle passe incognito. Une fois sur le parcours, ça se gâte. C’est Jock Semple, l’organisateur de l’événement, qui la remarque. Il débarque de son véhicule tentant de la pousser hors du parcours et de lui arracher son dossard. C’est à cet instant que Switzer comprend qu’elle doit absolument terminer sa course pour prouver au monde entier que les femmes sont capables de réaliser un marathon. Exploit qu’elle réussit. Les médias ayant assistés à la bousculade, le scandale se propage. L’AAU interdit formellement la participation des femmes. Puis en 1972 le combat prend fin. Les femmes gagnent pour la première fois le droit de courir le marathon de Boston dans les règles de l’art. Depuis, la proportion de femmes inscrites au marathon de Boston a connu une croissance de 0,7 % à 45,9 %*. Durant ses démarches Katherine Switzer a remporté le Marathon de New York en 1974 et compte plus de 35 marathons à son actif. Elle a complètement changé le visage du sport.
Il y a 50 ans il était impensable pour une femme de faire plus de 800 mètre, aujourd’hui grâce entre autre à Katherine Switzer, la course à pied est l’un des sports les plus accessibles. Ce printemps, cinq décennies plus tard, Switzer retourne à Boston pour boucler la boucle du passé.
Si elle a trouvé la force d’écrire cette page de l’histoire, vous trouverez certainement la motivation pour enfiler vos runnings ce weekend!
Kathrine Switzer, première femme marathonienne à Boston
Kathrine Switzer s’apprête à participer au marathon de Boston, là où il y a 50 ans, elle a changé le visage du sport américain à tout jamais. Portrait d'une pionnière qui n'a jamais cessé de courir -» http://bit.ly/2njOU9p
Posted by Radio-Canada Sports on Monday, April 3, 2017
Plus sur l’histoire de Katherine Switzer
*Source : Boston Athletic Association
Crédit photo: Getty dans, Le Nouvel Observateur